[ TOGUNA FORUM ] - LES ARTS TRIBAUX DU MONDE ENTIER

Un coup de coeur pour cette femme se lavant les parties intimes, elle m'a été vendue comme étant Congo, mais aprés recherche les scarifications ventrales font penser à l'Océanie, motif Asmat ?, mais la statue à des airs Ifugao !! Bref confusion;..quelqu'un à un avis, une piste ? Merci d'avance .

À mon avis Afrique.
Kongo ou apparenté ?
C*

A mon avis, Océanie (scarifications, yeux sertis de coquillage) et, plus précisément, possiblement Mélanésie. Si seulement j'avais le temps de faire une recherche...

Bonjour Aline,

Cette statuette est bien du Congo.
Elle est d'origine "Beembe", peuple vivant au sud de la république du Congo dans le département de la Bouenza, autour de Mouyondzi. Quelques communautés sont aussi établies dans le nord de l'Angola et au nord-ouest de la République démocratique du Congo. (Wiki).
Cette ethnie fait partie du grand groupe que l'on nomme "Kongo" et que l'on retrouve tout le long de la côte Atlantique, au sud de la république du Congo jusqu'en Angola en passant par la République Démocratique du Congo. (R.D.C - Congo-Kinshasa).

Je joints en plus de cette description, des photos de très belles statues Bembe où vous retrouverez
les scarifications de votre statuette. Même si on y voit plutôt des patines "crèmes" ou bruns-rouges. Mais il en existe aussi beaucoup avec cette même patine noire.
Je vois que les scarifications de votre statue sont similaires à celles des statues que je vous présente. Elles présentent des bras et des jambes plus musclées, mais les yeux incrustés de faïences appuient cette hypothèse. Je pense que votre statue est bien Beembe.
À bientôt et bien à vous.

Cordialement.
Fabien

Je ne pense pas qu'elle soit du Congo, la posture en action de vie quotidienne, les yeux en coquillage comme le dit Véronique . Les Bembe sont souvent dans une pose hieratique, raide, de pouvoir, et masculin ....les scarifications ne sont pas les mêmes , Iles Salomon me semble une trés bonne piste, merci à Veronique et aux autres réponses aussi ....

Bonjour à tous
Personnellement, je pencherais pour les Bembe, proposé par Fabien. Un critère bien utile serait de savoir si les yeux sont en céramique/porcelaine/verre blanc (spécifique bembe) ou en coquillages (plutôt Océanie)
Autres critères :
- l’absence de pupilles contrairement à la plupart des pièces océaniennes. Appelée : « meeso masenguka ku mbasi ». Elle a un sens complexe et des fonctions précises. Globe oculaire blanc comme s’il était retourné. Permet de rendre visible l’invisible.
- il est vrai que les statues bembe sont hiératiques mais la position accroupie (« sondama ») existe. Elle répond à des codes et à des situations précises.
- les scarifications sur le ventre en forme de double crochet et encadrées par 2 lignes verticales. Bembe.
Bonne journée

Comparaisons :
- La coiffure, nettement à l'arrière du visage - style Bembe : coiffure sur le top
- Le tour des yeux souligné
- Le nez long et fin
- La forme des oreilles
- Les membres longs et fins vs dodus chez les Bembe
- Les scarifications dans un 'cartouche'
- La base/le socle rond
- ... et les seins, Messieurs, les seins !!

Véronique gagne par 6 à 0 !!

Huhmm ! Désolé, mais pas très convaincu. Tous les critères ne se valent pas ;-)
- scarifications : bembe. Et elles sont bien dans un cartouche ! = Bembe
- les exemples bembe à membres pas dodus dis-donc :-) sont nombreux, notamment dans les pièces peu anciennes.
- coiffure en arrière, plate, soulignée par une ligne, front dégagé. Je ne vois pas de différence criante.
- Les seins, pareil que pour les membres ! On trouve bien des seins bembe pas dodus, pas besoin d’un des seins :-)
- le socle rond. Pas un élément décisif, surtout si l'objet n'est pas très ancien.
En revanche,
- quid des motifs sur le ventre ? C’est un critère d’identification essentiel, non ? Je n’en connais pas d’aussi ressemblants ailleurs, et sur le ventre, et en cartouche. Mais peut-être que ça existe...
- les yeux blancs. Critère essentiel bembe. Quasi-inexistants en Océanie (rares exemples Nouvelle-Guinée et Hawaï mais les statues n’ont aucun autre point commun. Coquillage ou faïence ? À vérifier mais comment, je ne sais pas. (avec une épingle ?) Une photo en très gros plan pourrait aider.
- visage (et coiffure ?) plus africain qu’océanien, vous ne trouvez pas ?

Bon, je peux me tromper mais tant qu’on n’aura pas vu de statues identiques venant d’ailleurs (et de sources fiables !), on ne pourra rien affirmer. En leur absence, l'hypothèse bembe reste la plus plausible.
Comparaisons !

Pour mettre un peu d'huile sur le feu, les yeux très dur, semblent en nacre de coquillage et les scarifications ventrales ressemblent aux roussettes stylisées chères aux Asmat !!

https://www.art-tribal-africain.com/art ... t-patzwahl

Bonjour Aline!

Pièce -TRES- intéressante!
Pour l'heure, je penche aussi pour l'Afrique: allure générale et coiffure.

Pourrais-tu aussi publier une photo de ta statuette de dos?
Car pour ce que j'en vois,
la stylisation des fesses pourraient être typiquement du centre de l'Afrique.

Mais rien de certain :-)
Sino

Pour le spécialiste des fesses =>

Merci Aline!
Ce n'est pas ainsi que j'imaginais le côté pile:
ni la ceinture ni les fesses ni la colonne vertébrale.
Est-ce des scarifications sur les omoplates?

Je n'ai donc pour l'heure rien de très intéressant à ajouter :-)

Une intuition tout de même: une plastique proche des PEMBE,
voire issue des PEMBE, plutôt que "strictement PEMBE"
ou alors une belle transformation de ce style.

J'émets aussi l'hypothèse que cette statuette pourrait-être liée à un rite d'initiation
à l'occasion des premières menstruation - d'où mon intérêt pour ta pièce.
En outre, cette hypothèse expliquerait la plastique des seins, celle du début de la puberté.
Mais ce n'est qu'une hypothèse :-)
Lire les articles scientifiques, relatifs à ce sujet, disponibles sur le web,
pourrait conduire quelque part,
Mais sans garantie de résultat!

Je pense que si nous ne trouvons pas tout de suite une réponse consensuelle, sous la Toguna,
ce n'est qu'une question de temps car ta pièce est vraiment stylée et plus qu'intéressante.
Nous finirons probablement par tomber sur une pièce comparable
et attribuée qui nous mettra tous d'accord.

Par ailleurs d'autres Toguniens chevronnés ne se sont pas encore exprimés...

Bonsoir Aline, ainsi que tous les participants à cette intrigante énigme.
Au vu des trois premières photos, j'ai immédiatement pensé à une provenance de la Mélanésie et plus particulièrement, des îles Salomon (une certaine similitude avec des crânes d'ancêtres).
Mais la piste africaine que nombre d'entre-vous développe, est certes non dénué d'intérêt.
Etant ces quelques jours en Sud Vendée, loin de ma documentation, Je ne saurai en dire plus pour l'instant et je trouve cette pièce belle et intéressante.
Pat

Ensuite des posts de VERONIQUE et de PADDY,
J'ai jeté un oeuil dans la base de données du QUAI BRANLY
http://collections.quaibranly.fr/
Et force est de reconnaître que ce que j'y ai vu
fait nettement pencher la balance du côté des ILES SALOMON !
Ouah!!!

Par exemple ce "dieu requin" (pile et face).
J'ai aussi vu dans la base: des yeux blancs, etc.

Salut ALINE!

Conformément à des paroles de chansons rituelles, ta sculpture pourrait représenter une femme s'enduisant l'intérieur du vagin de pulpe de "puru" (une colle végétale utilisée par les sculpteurs) - en vue de le décorer de coquillages - ou alors de pudding. Plus simplement, elle pourrait être liée à une protestation contre des peurs et des interdits liés aux pertes de sang lors des menstruations ou à l'exhibition du vagin. Il se peut aussi que toutes mes hypothèses soient erronées :-)

Tu trouveras les éléments anthropologiques et ethnographiques dont sont issues mes hypothèses, dans cet article à la page 391:
Revolon, « Wogasia Un rituel des premiers fruits à Aorigi (Santa Catalina, Sud-est des Îles Salomon) ».
https://www.jstor.org/stable/pdf/404673 ... ZgnAiWodXO

Tu pourrais essayer d'en contacter l'auteure pour avoir son avis.
Voici son email: sandra@pacific-credo.fr
Et si tu obtiens une réponse, tiens-nous au courant stp :-)

Comment cette pièce est-elle arrivée jusqu'à toi?

Sino

Serait-il possible d'avoir une image du dessous de la statuette?
si elle n'est pas trop bien fixée à son socle s'entend.

Merci a Sino, grand passionné, je vous tiendrais au courant .... ;-)

Bonjour à tous
Merci Sino pour le très bon document de jstor. Belle découverte anthropologique, très riche et surprenante. Désolé, cependant, mais je ne te suis pas sur cette voie sans vouloir te vexer ;-)

Je l’ai lu attentivement. La chercheuse explique que cette pratique du petit îlot d’Aorigi s’exprime verbalement à travers des chants entre femmes, exclusivement à l’insu et à l’écart des hommes et seulement pendant la fête annuelle du wogasia. Ces chants obscènes et confidentiels entre femmes jouent un rôle ponctuel d’exutoire et de revanche contre la brutalité et la domination des hommes, qui semblent hélas être la règle toute l’année. Sandra Revolon, qui a interrogé longuement les femmes, ne mentionne aucune représentation matérialisée de cette pratique et précise même que pour une femme « donner à voir son sexe et a fortiori l’intérieur de son sexe » est un interdit.

En outre, seuls les hommes ont le droit de sculpter des objets. On les imagine mal fabriquer des statues pérennes qui les ridiculisent et remettraient en question leur pouvoir, et d'autant moins que l’un des nombreux buts du rituel complexe du wogosia est de souder la communauté. À l'inverse, si c’étaient des femmes qui créaient ces statues, elles transgresseraient un quadruple tabou susceptible de déstructurer la société, chose impensable dans les cultures ethniques : sculpter du bois, incruster des coquillages (2 privilèges absolus des hommes), montrer et exposer le sexe féminin, dénier la domination des hommes.

L’hypothèse -légitime- de départ est donc infirmée par les textes et par les faits. Pour l'instant.
Et toujours aucune trace d’œuvres océaniennes réunissant les caractères dominants de la statue, ou au minimum 3 ou 4 d’entre eux car plus il y a de critères ethniques spécifiques dans un seul objet, plus crédible est l'identification.
J’ai consulté la base îles Salomon du quai Branly (893 objets et photos anciennes). Pas du tout convaincu...

En dehors de ces considérations et quelle que soit son origine, cette statue hors-norme me plaît bien. Elle exprime deux notions antinomiques : puissance et intimité.

Salut SACRE IBIS !
Tu es gentil de ne pas vouloir me vexer :-)
Mais au contraire! j'apprends toujours énormément sous la TOGUNA et je m'en réjouis!

Pour ce qui est du style, je pense, pour l'heure, que VERONIQUE et PADDY ont vu juste: MELANESIE, ILES SALOMONS ou environs. L'allure générale (c'est elle qui compte pour moi) du "dieu requin" que j'ai publié m'en a convaincu mais qui sait? peut-être que je changerai d'avis devant une pièce que j'estimerai plus convaincante.

Pour ce qui est de ma tentative d'interprétation, tes critiques me semblent très pertinentes. Je t'en remercie! Tu m'apprends à réfléchir ethnologiquement :-)

Toutefois, l'expression de la thématique du vagin - mentionnée dans l'article de Sandra RENOVON - pourrait vraisemblablement se décliner dans d'autres rituels et sous d'autres formes au regard des milliers d'îles environnantes.

Affaire à suivre...
Sino

1) Sino tu écris : « l'article de V, [?] c'est qu'il met en avant une situation sociale - dans un spot de la la zone géographique »
"l'expression de la thématique du vagin - mentionnée dans l'article de Sandra RENOVON - pourrait vraisemblablement se décliner dans d'autres rituels et sous d'autres formes au regard des milliers d'îles environnantes."

Toujours sans vouloir te froisser ;-), je regrette mais tu ne peux pas faire dire à un auteur ce qu’il ne dit pas. Sandra Revolon a étudié un événement dans un lieu précis, un îlot de moins de 800 habitants. En scientifique rigoureuse, elle se garde bien de supputer que c’est pareil ailleurs, alors même qu'elle connaît la région 100 fois mieux que nous. Généraliser sa recherche à toute une aire géographique est abusif ou alors il faut le démontrer, ce qui est impossible pour l’instant et donc, invalide l’hypothèse. Ou alors, toutes les hypothèses et leur contraire se valent et tout le monde a raison, ce qui ne mène nulle part ! Pire : dans ces cas-là, c'est ceux qui parlent le plus fort qui ont raison. Mais c'est pas le genre du forum, hein !

2) Pour la ressemblance entre le « dieu requin » et la statue, voir photo.
Il faut se méfier du biais de confirmation qui nous guette tous mais on peut le tenir à carreau :-)
https://www.universite-paris-saclay.fr/ ... er-jip.pdf

https://fr.wikipedia.org/wiki/Biais_de_confirmation

Salut SACRE IBIS!

J'ai complété ton montage comparatif et j'avoue qu'en l'état je penche à nouveau du côté de l'Afrique centrale! As-tu une image du dos de la statuette PEMBE? Les PEMBES stylisent-ils la colonne vertébrale? en négatif?

Affaire à suivre
Sino

PS - pour l'article "V" je me suis simplement mal exprimé.

« Yaka» demander. Je ne pense pas que la colonne soit un critère majeur mais en voici une.

J’en profite pour reparler des Bembe. Il ne faut pas confondre Bembe et… Bembe ! Je m’y perds entre les 2 ethnies homonymes qui prêtent à confusion partout sur le web et dans les ouvrages, y compris chez les plus grands comme Christie’s. Même l’excellent ouvrage de JM. Bacquart ne fait pas vraiment la distinction dans une de ses cartes (photo).
L’une est présente grosso modo au Congo ou Congo-Brazzaville et États voisins. L’autre à l’est de la République Démocratique du Congo, lac Tanganyika et États voisins. Usuellement, le type de statue qui fait débat ici est estampillé bembe, terme générique pour les 2 ethnies. Mais si j’ai bien compris, elles seraient de l’ethnie du Congo (Brazzaville). Pour cette raison, certains préfèrent la dénomination Beembe pour cette ethnie du Congo et Bembe pour la RDC.
https://detoursdesmondes.typepad.com/dt ... agiqu.html

Nul doute que les africanistes du forum en sauront plus que moi et pourront en dire plus ou corriger si besoin.

Pour illustrer le sac de noeuds, voici 2 statuettes nommées "Bembe", dont l'une de Christie's provenant de RDC sans plus de précision, sachant que les "Beembe" du Congo sont aussi un peu présents au nord-ouest de la RDC.
La seconde "bembe" aussi mais provenance claire : Congo-Brazzaville, donc "beembe" selon Détourdesmondes et wikipedia.